Nous n'avons pas tous les mêmes chances dès le début. On naît, accidentellement ou après de nombreuses tentatives, mais jamais avec un nombre de chances égales. Certains seront beaux, bien fait. D'autres auront l'intelligence, la mémoire, la déduction facile. Et puis il y a ceux qui n'auront rien de tout cela. On se plaint, mais on ne regarde pas assez notre voisin.
Aidan lui, n'avait pas de quoi se plaindre à l'origine. Il avait eut une apparence plus qu'agréable et une tête bien pleine. Mais il a hérité de ce que le hasard ne fait pas : la mauvaise famille.
Pourtant, bien des années plus tard, on le retrouve vivant. Il a survécu aux insultes, à la violence, à la fatigue. Plutôt discret de parole, le trentenaire en impose maintenant de sa présence et de son regard sombre. Il transporte beaucoup, en cache encore plus. Trop secret, trop mystérieux. Impénétrable.
Jusqu'à elle.

"Allez on accélère ! S'exclama-t-il en arrivant dans la salle de douche mixte. Ce n'est plus l'heure des recrues bordel !
- Peut-être que si on était pas harcelés à longueur de journée par un tyran, on serait plus rapides et efficaces pour exécuter des ordres ! lança-t-elle en contrôlant difficilement les tremblements de rage de sa voix, sachant qu'elle regretterait rapidement d'avoir une fois de plus ouvert sa gueule.
- Hopkins, on peut savoir qui vous a autorisé à ouvrir votre gueule ? S'exclama-t-il en se tournant vers elle pour la défier de son regard énervé." Cette gamine lui sortait vraiment par les trous de nez, et ceci même si elle était seulement enroulée dans sa serviette, les cheveux trempés.
"Si vous ne supportez pas un tyran, cassez-vous, car l'ennemi ne sera pas plus agréable que moi sur le terrain.
- Personne, répondit-elle tout simplement, fulminant au plus profond de son être. Ça par contre, permettez-moi d'en douter : personne n'arriverait à être plus intolérant et gueulard que vous, ça je peux vous l'assurer.
- Je préfère ouais, fulmina-t-il en se disant que s'en était enfin terminé avec celle-ci."
Il entendit le souffle de la jeune femme, puis sa réponse, qui le fit rougir d'énervement.
"J'vais vous donner un conseil Hopkins, ici c'est moi qui fait les règles, alors vous allez fermer votre gueule, vous allez rentrer dans le rang et vous allez arrêter vos petites réflexions de gamine ou c'est moi qui vous dégage dehors. Parce que je veux de vrais hommes sur le terrain, et pas des connasses faibles qui couinent parce que le sergent est gueulard. C'EST CLAIR ?
- Ok."
Elle haussa les épaules.
"Mais je continue de penser que ça doit être extrêmement chiant et frustrant de se retrouver à hurler et menacer pour obtenir le dernier mot. Est-ce lié à un manque d'autorité naturel ou est-ce tout simplement parce que vous adorez votre voix ?
- Tu fermes ta gueule aujourd’hui ou demain ? Enragea-t-il en se retenant pour ne pas la frapper. T'es qu'une petit conne hyper chieuse alors sérieusement dégage, trouves toi un autre escadron, j'vais péter un câble si j'vois encore ta petite gueule s'ouvrir.
- Même demain me semble être un futur trop proche, répliqua-t-elle avec un sourire en coin.
- Arrêtes de faire la maligne, t'es qu'un bébé qui joue la grande, dit-il en s'avançant vers elle. J'ai juste envie de t'en coller une, mais j'veux pas me faire virer pour une connasse."
Puis soudainement, il lui attrapa les lèvres et les mordilla dans un baiser rapide et inattendu.

C'est elle qui changea tout. Comme un ouragan, une tornade inattendue qui le forçait à vivre. Elle l'énervait, l'excitait, le rendait fou : une palette de sentiments qu'il avait enfoui bien trop longtemps. Aidan avait été une ombre, le poids de son passé qui lui pesait à chacun de ces pas.